QUEER NE PEUT PAS ÊTRE COMMANDÉ
QUEER NE PEUT PAS ÊTRE COMMANDÉ
Tremblez, tremblez, les sorcières sont de retour
MAI 2024 - REGARD
"L'identité queer, c'est d'abord le choix de demeurer au seuil des identités [...] c'est un choix radical de transition permanente, par lequel chacun peut décider de ne pas se confiner et de confiner ceux qu'il aime (pas seulement ceux qui le désirent sexuellement) dans une définition finale, pas même ceux de la communauté LGBTQIA+ à laquelle il peut appartenir. ”
Bien que la société patriarcale ait donné aux hommes un rôle dominant pendant des siècles, leurs privilèges commencent à être remis en question par l’émancipation progressive des femmes et les demandes de la communauté queer large et variée.
Cette reformulation des relations de pouvoir ébranle même la binarité de genre, l’un des piliers fondamentaux du patriarcat : l’archéologie du genre en est venue à démontrer l’existence de personnes fluides même dans les civilisations les plus anciennes, soulignant comment même le catalogage des découvertes au fil des siècles a été affecté par les préjugés sexistes des chercheurs.
Pourtant, ce modèle de masculinité hégémonique est encore largement considéré comme le seul possible, et pour cette raison, ses attitudes dénigrantes continuent d’être tolérées, voire légitimées, y compris les dérives misogynes, homophobes et transphobes les plus dangereuses.
En fait, la récente nouvelle selon laquelle la drag queen française Minima Gesté portera la flamme olympique à son arrivée à Paris, le 14 juillet, a suscité de violentes controverses et de lourdes insultes. Un choix impensable jusqu’à il y a quelques années, mais courageux et significatif, puisque la flamme a toujours été un symbole de paix, d’humanité et d’égalité, et que les drag queens jouent un rôle crucial dans le long et cahoteux chemin de reconnaissance des droits de la communauté LGTBQIA+.
Leur histoire remonte à la seconde moitié du XIXe siècle, lorsque le terme a été utilisé pour la première fois en Angleterre, composé de drag – acronyme de Dressed Resemblig A Girl – et queen, qui signifie quean ou qwene, qui à l’époque était synonyme de femme aux mœurs légères ou de personne homosexuelle.
Pendant ce temps, à l’étranger, dans les banlieues de New York et de Washington D.C., les premiers bals de drag se répandaient, des soirées dansantes clandestines bruyantes qui rassemblaient des représentants noirs et latino-américains de la communauté LGBTQIA+ naissante.
C’est l’origine de la première drag queen connue qui s’est réclamé de ce surnom : William Dorsey Swann, un Afro-Américain né dans le Maryland dans des conditions d’esclavage en 1858. Déménageant à Washington, D.C., pour travailler comme serveur, Swann a commencé à organiser des concours de cakewalk, une danse populaire parmi les esclaves qui parodiait les réceptions blanches.
Nous connaissons son existence grâce à un texte de présentation publié en 1888 dans le Washington Post, qui rapportait la nouvelle d’une descente de police dans la maison de Swann, pris en compagnie de six hommes noirs parmi des plumes d’autruche et d’élégants costumes de soie.
Après avoir purgé environ un tiers de sa peine, Swann a adressé une pétition au président des États-Unis. La grâce fut cependant refusée et son histoire rejetée comme une question triviale d’immoralité et de prostitution homosexuelle.
Pourtant, Swann était à toutes fins utiles l’activiste qui a défendu le premier le droit de la communauté queer à se réunir librement et à transgresser les normes sociales rigides de l’époque, tout en permettant à ceux qui, comme lui, sont nés dans des conditions d’esclavage de s’exprimer sans retenue, au-delà des implications sexuelles lubriques.
Car, comme l’écrit Murgia, l’homosexualité est d’abord et avant tout « le choix de demeurer au seuil des identités […] c’est un choix radical de transition permanente, par lequel chacun peut décider de ne pas se confiner et de confiner ceux qu’il aime (pas seulement ceux qui désirent sexuellement) dans une définition finale, pas même ceux de la communauté LGBTQIA+ à laquelle il peut appartenir »*.
* Michela Murgia, “Dare la vita”, Rizzoli, Milan, Janvier 2024, pp.29.
par Federica Araco
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Total Look: Calvin Klein @calvinklein
Fotografo: Gabriel Alejandro @at.gavi
Creative Director & Fashion Editor: Veronica Mazziotta @veronicamazziotta
Photo Editor: Valeria Ribaldi @ribovale
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Stylist: Veronica Mazziotta @veronicamazziotta
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