QU'EST-CE QUE L'INVENTION DE L'AVION SI CE N'EST NE PAS ÊTRE CAPABLE D'EXPLOITER LE VENT?

L'invitation au voyage à l'image de Valentina Sommariva

JUILLET 2024 - REGARDS

Los Angeles, Usa ©Valentina Sommariva

“C'est comme si le courant vous entraînait. Je suis comme la sterne arctique, Excellence. C'est un oiseau, un bel oiseau blanc qui vole du pôle Nord au pôle Sud et qui revient.”

Bruce Chatwin, Le vie dei canti.

Voyager, c’est se déplacer, abandonner des lieux connus, essayer d’atteindre une destination.

Mais voyager, c’est avant tout se laisser emporter par un courant, s’adapter pour suivre une force que l’on ne peut pas contrôler. Le vent est l’un des courants les plus violents sur terre, comme l’eau. Une force qui peut construire de très hautes dunes et de larges vallées, déplacer les courants marins et façonner les côtes, déplacer les graines de plantes pour créer de nouveaux espaces verts, qui sont d’abord sauvages, puis seront travaillés par les animaux, y compris l’homme.

Voyager, c'est se déplacer, abandonner des lieux connus, essayer d'atteindre une destination
Voyager, c'est se déplacer, abandonner des lieux connus, essayer d'atteindre une destination

Le vent est l’élément qui donne forme aux choses. Comment en êtes-vous arrivé là ? Posons-nous la question du mur de lierre, de l’écume de la mer, du cône d’Arita qui s’élève sombre au centre du désert de sel blanc. Ils répondront : avec le vent. Même une lettre livrée dans une boîte aux lettres sur le bord d’une route arrivera à destination avec le vent. (Qu’est-ce que l’invention de l’avion si ce n’est ne pas être capable d’exploiter le vent ?)

Cono de Arita, Argentina ©Valentina Sommariva

Portés par le vent autour de la Terre, nous changeons de point de vue.
D'où regardons-nous ?

Lapland, Finland ©Valentina Sommariva
Milan, Italy ©Valentina Sommariva

L’œil de Valentina Sommariva semble s’éloigner pour nous montrer des paysages aliénants. C’est un œil divin parce qu’il voit tout, générant l’étonnement. Ayant complètement éliminé le cadrage subjectif, le point de vue s’élève vers le haut mais sans nous montrer exactement où. Lorsque nous voyons une figure humaine, elle est si loin qu’elle semble rétrécie. Devant le LACMA de Los Angeles se dresse  la Levitated Mass (2012) de Michael Holzer : un immense mégalithe de granit qui semble petit par rapport à l’architecture contemporaine. Effet inverse : une termitière photographiée dans un désert australien ressemble à une sculpture à taille humaine trouvée dans un paysage archéologique. 

Lapland, Finland ©Valentina Sommariva
La Palma, Canary Island ©Valentina Sommariva
La Palma, Canary Island ©Valentina Sommariva
La Palma, Canary Island ©Valentina Sommariva

Pourtant, la termitière magnétique, qui se forme en l'absence de pollution lumineuse,
Il a la forme d'un château,
pour abriter l'une des sociétés les plus complexes du monde animal.

Northern Territory, Australia ©Valentina Sommariva
Northern Territory, Australia ©Valentina Sommariva

En l’absence d’un élément qui suggère des proportions, nous nous rendons compte que sur Terre l’homme est petit, immergé dans des phénomènes beaucoup plus vastes. Les choses prennent forme, façonnées par les éléments, parfois protégées par eux. De même que l’homme construit des maisons et des boîtes, enveloppe des régimes de bananes, de même le lierre enveloppe une maison et la glace protège la pierre, lui donnant une nouvelle forme. Les mêmes forces qui font apparaître la mer comme une surface rocheuse ondulée par le vent, façonnent le désert de pierre ponce dans le nord de l’Argentine comme s’il s’agissait d’un matériau fluide.

Uluṟu, Australia ©Valentina Sommariva
Monte Etna, Sicily ©Valentina Sommariva

Et encore, où vont ces gamins perdus dans le brouillard sur un volcan de lave, toujours détournés, pendant que nous les observons d'en haut ?
Ce regard n'est-il pas précisément le regard du vent ?
N'est-ce pas là une invitation au voyage, qui libère l'œil des formes habituelles et des distances déjà parcourues ?

Campo de Piedra Pomez, Argentina ©Valentina Sommariva
par Camilla Pietrabissa